Critiqué par Débézed, le 1 juin 2020 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 73 ans)
Déchirant !
Ce recueil comporte deux longues nouvelles, ou deux courts romans, ou un court roman et une longue nouvelle mais peu importe le contenant, il nous restera toujours l’émotion dégagée par ces deux textes pathétiques, tragiques, poignants… Des histoires qui auraient pu figurer dans Les désemparés un précédent recueil de Francis Denis.
Jardins(s)
Un quadragénaire vivant seul avec son animal de compagnie éprouve les affres d’une profonde solitude, il se sent ignoré et même rejeté par son voisinage, il a l’impression de ne pas exister pour les autres, il est insignifiant. Pour se faire remarquer, pour exister, il décide de construire dans son étroit jardin, une piscine particulière qu’il ouvre aux enfants du quartier. Il est alors beaucoup mieux considéré, les voisins le saluent, il est un personnage du quartier, il existe. Mais il lui faut payer les travaux de construction de cette piscine et le maçon le fait chanter au sujet de certaines formalités administratives qui n’ont pas été respectées. Le maçon subit ce que risquent tous les maîtres chanteurs et les malheurs du pauvre bougre recommencent. Il espérait construire une vie nouvelle avec la belle Clotilde mais son forfait, bien qu’ignoré de tous, risquent de remettre en cause tous ces beaux projets.
Le drame de la solitude, de ceux qui, comme ce garçon, ont été transbahutés de foyers en familles d’accueil, ne s’installant jamais réellement dans la vie, restant à tout jamais des déracinés, des apatrides de la société. Le déchirement aussi de la culpabilité qui condamne plus sévèrement que les tribunaux.
La femme trouée
L’histoire d’une fille qui raconte une l’histoire qu’elle aurait peu avoir mais qu’elle n’a pas eue. Enfant, Marguerite a fait une très grosse bêtise, elle a allumé un incendie en jouant avec les enfants des maîtres de sa mère. Elle s’en est sortie mais les deux autres enfants ont péri dans les flammes. Après une longue hospitalisation, elle a pu reprendre une vie indépendante avec sa mère qui a consacré toute son existence à cette enfant muette et handicapée. Son amour pour sa fille est sa seule raison de vivre et, quand elle décède, Marguerite écrit l’histoire qu’elle aurait pu avoir si sa mère ne l’avait pas étouffée de son amour. C’est bouleversant !
Francis Denis écrit ces textes dans une langue simple, précise, épurée, fluide, élégante, très agréable à lire même s’il raconte des histoires déchirantes. Cette écriture permet de lire ces textes bouleversants avec moins de douleur.